Le 2 février 2023 a été promulgué une loi* visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée. Si l’intention initiale du texte est louable, la MBF s’inquiète du possible usage qui pourra en être fait.
Des bienfaits pour la biodiversité mais pas pour le porte-monnaie
L’élément cœur de cette loi est l’obligation faite aux propriétaires de terrains en espaces naturels (à quelques exceptions prêtes) de remplacer leurs clôtures, bien souvent imperméables, par des dispositifs permettant un passage plus aisé de la faune. Cette disposition va permettre d’aérer les forêts françaises, autant esthétiquement que sanitairement en permettant un meilleur brassage des animaux. Un plus pour la biodiversité que nous ne pouvons que saluer.
En contrepartie, dans une optique de rassurer les propriétaires « des intrus qui pourraient profiter de cet allégement des barrières », les parlementaires ont voté que
« dans le cas où le caractère privé du lieu est matérialisé physiquement, pénétrer sans autorisation dans la propriété privée rurale ou forestière d’autrui, sauf les cas où la loi le permet, constitue une contravention de la 4eme classe » (amende forfaitaire de 135€, article 8)
Une écriture floue laissant trop de place à l’interprétation
Avant l’arrivée de cette loi, se trouver dans un espace naturel privé n’était pas sanctionnable pénalement. Un propriétaire pouvait seulement demander au civil une compensation en cas de dégradations de son terrain. Pour les VTTistes, nous pouvions tout de même déjà être verbalisés si nous étions pris en train de rouler en dehors des sentiers dans un lieu soumis au Code Forestier (cela ne change pas).
Si cette nouvelle disposition législative est raccord sur le fond avec le discours MBF (pas de hors-sentiers, on ne roule pas n’importe où), son écriture est trop imprécise. Le terme « matérialisé physiquement » ne permet absolument pas de deviner ce que le législateur a voulu mettre derrière : un coup de peinture sur un rocher, un tronc en travers, un câble de fer entre deux arbres … Les préposés aux verbalisations auront donc toute latitude pour dresser une amende sur leurs propres critères. Il faudra malheureusement attendre qu’un usager de sport outdoor conteste une contravention abusive et qu’une jurisprudence soit établie pour y voir plus clair. Soit un temps long et de l’argent perdu au tribunal…
Et la sécurité dans tout ça ?
Durant l’examen du texte, la MBF a soutenu le travail parlementaire du CODEVER qui a tenté de faire inclure dans la loi l’interdiction de tout élément de clôture / piège qui pourrait mettre en danger une personne circulant sur un sentier. Les amendements allant dans ce sens ont tous été rejetés.
De cette séquence parlementaire, nous tirons deux enseignements :
- Continuer à tisser notre réseau politique car c’est sur ce terrain-là que se joue en off puis à l’Assemblée nationale le futur de notre pratique, et bien souvent par des acteurs sans la moindre connaissance des activités de plein air
- Remettre une pièce sur la gravité que représentent les pièges dans les espaces naturels pour les usagers
Parce qu’#EnsembleNousSommesPlusForts, n’hésitez pas à nous signaler de toute situation en rapport avec cette nouvelle loi.
*Il semblerait que le décret d’application ne soit pas encore promulgué