
Quand bien faire se retourne contre vous
En mars 2019, des VTTistes des environs de Bitschwiller, soucieux d’être acteurs de leur pratique, demandent à la mairie une autorisation pour entretenir un sentier de la commune qu’ils empruntent régulièrement. A la place d’un accord ou même d’un refus, ils reçoivent l’information d’un arrêté municipal tout fraichement pris qui interdit le VTT sur ledit chemin. La douche froide.
Face à l’impasse, le tribunal
Comme à notre habitude, la MBF a privilégié la voie du dialogue d’abord à travers les VTTistes locaux concernés, puis de manière plus formelle par recours gracieux. Le maire est resté sur sa position à chaque approche. La MBF n’a donc pas eu d’autres choix que porter le sujet devant la justice, malgré une ultime tentative de médiation proposé par le juge, solution à nouveau refusée par le Maire.
Le jugement du tribunal
Sur l’étroitesse du sentier qui serait susceptible d’entrainer un risque de collision ou de conflit d’usage
Le tribunal considère que le sentier est « suffisamment large et offre une bonne visibilité à certains endroits pour permettre le croisement des piétons et des vélos circulant à allure réduite. Si la commune fait valoir les risques d’accident et de conflit d’usage, elle n’apporte pas de preuve tendant à établir une fréquentation du sentier telle qu’elle accroîtrait ces risques. Si la commune fait encore valoir la présence de pierres et de roches, d’escaliers naturels en pierres et en rondins, d’arbres et de branches, il ne ressort pas des photographies produites au dossier par les deux parties que ces éléments dépasseraient par leur taille ou leur nature ceux habituellement présents sur un sentier forestier en pente, auxquels tout usager peut raisonnablement s’attendre. » Il ajoute qu’ « en interdisant tout usage du vélo tout-terrain sur l’ensemble du sentier, alors même qu’un autre chemin pourrait être emprunté, le maire a commis une erreur d’appréciation en prenant la décision attaquée. »
En conséquence, le Tribunal a décidé d’annuler l’arrêté n° 50/2019 du 29 mars 2019 par lequel le maire de la commune de Bitschwiller-les-Thann a interdit l’usage du vélo tout terrain sur la portion de sentier pédestre allant du haut du point de vue du Ewel jusqu’à l’arrivée du sentier de la Châtaigneraie. La circulation de VTT sur ce chemin est donc à nouveau possible.
Cette décision nous satisfait car elle va dans le sens de ce que nous défendons au quotidien sur le terrain. Un point attire plus particulièrement notre attention : l’idée aujourd’hui que l’on va vers une responsabilisation du pratiquant par rapport au « risque prévisible » ou « normalement attendu » sur les sentiers tel qu’exprimé par le juge dans sa décision « […] ceux habituellement présents sur un sentier forestier en pente, auxquels tout usager peut raisonnablement s’attendre ».
- Antenne MBF Massif des Vosges
Sur les aménagements et les signalétiques installés
La commune avait apposé à l’entrée du chemin un portique en bois empêchant le passage des vélos. Le tribunal juge que « les motifs du présent jugement impliquent qu’il soit enjoint à la commune de Bitschwiller-les-Thann de procéder, dans le délai d’un mois à compter de sa notification, au retrait des aménagements et signalisations installés sur le sentier pour l’application de l’arrêté n°50/2019 du 29 mars 2019. »
Sur le dédommagement de la MBF pour les frais de justice engagés
Le tribunal estime qu’ « il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Bitschwiller-les-Thann la somme que l’association Mountain Bikers Foundation demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. »
Cette décision est intéressante à plusieurs égards.
Tout d’abord, c’est la première fois qu’un tribunal administratif se prononce sur une telle question en ce qui concerne le VTT. Cette décision pourra donc servir dans d’autres affaires comparables dont la MBF est régulièrement saisie.
Ensuite, cette décision porte sur des motifs souvent mis en avant par les propriétaires et gestionnaires, tels que les risques de conflits d’usage ou d’accidents et le tribunal rappelle bien que la seule potentialité de ces risques ne suffit pas à justifier une interdiction.
Elle vient confirmer que face aux idées reçues et aux lieus communs sur notre pratique, notre engagement est juste. Mais elle montre aussi que le comportement des pratiquants, respectueux à l’égard des autres usagers et des sentiers sur lesquels ils évoluent, est indispensable pour garantir la pérennité de notre pratique.
- Commission juridique de la MBF
Conclusion
En synthèse le tribunal administratif de Strasbourg décide que :
- L’arrêté 50/2019 est annulé ; les VTT sont donc libres de circuler sur ce chemin et nous ajoutons, en tant qu’association responsable, dans le respect des autres usagers et de l’environnement ;
- Les aménagements et signalétiques installés doivent être retirés sous 1 mois, ce qui garantit l’application effective de la décision :
- La demande de l’association de paiement de ses frais de justice est rejetée. Ceci est regrettable, mais montre que l’adhésion à la MBF et les cotisations versées trouvent toute leur utilité.
Pour que nous puissions continuer à défendre une pratique durable et responsable du VTT, nous avons besoin de votre aide : soutenez-nous !
#EnsembleNousSommesPlusForts